PRENONS un médecin, un agent d’entretien, un ingénieur et un ouvrier peu qualifié. Mettons que tous les quatre effectuent un travail de bonne qualité le même nombre d’heures par semaine.
Jugez-vous que le médecin et l’ingénieur doivent gagner plus que l’agent d’entretien ou que l’ouvrier peu qualifié ?
Si oui, alors vous jugez que l’accomplissement de certains travaux justifie également une hiérarchisation des niveaux de vie. Vous soutenez la loi existante dans sa violence économique au détriment des moins aisés.
Comparons cette discrimination salariale avec la bonne vieille discrimination raciale. Celle-là est généralement fondée sur une différence de couleur de peau, parfois sur une distinction d’origine ancestrale (continent ou région du monde).
Partisans de la discrimination salariale, vous jugez certains travaux moins « nobles » que d’autres. Selon vous, leur valeur est inférieure à d’autres. Vous jugez aussi que l’agent d’entretien est indigne du confort matériel du médecin. Bien souvent, vous programmez vos enfants afin qu’ils reproduisent votre comportement discriminatoire à l’âge adulte.
Votre jugement brise un équilibre social à la source d’un bien-être individuel et collectif : sur un plan économique, ou bien on prospère ensemble ou bien on en bave ensemble ; à qualité et à heures de travail égales, on a tous le même salaire. Il n’y a pas de société authentiquement fraternelle sans cette équité économique.
Vous trahissez quotidiennement votre république en falsifiant le sens du mot fraternité et en le remplaçant par votre charité. Cela vous arrange bien de donner ce que vous voulez à vos bonnes œuvres. Votre charité n’est qu’une autre façon de regarder de haut celles et ceux à qui vous donnez et de garder un avantage économique sur d’autres.
Les fondements des discriminations raciale et salariale sont différents. Mais au fond, votre discrimination, basée sur une hiérarchisation dégradante des êtres humains, vous unit.
Allez donc étreindre le bon vieux raciste du coin. Vous lui ressemblez.
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